dimanche 15 septembre 2013

Mon premier 11 septembre





Longtemps le 11 septembre n'a rien évoqué de particulier au citoyen français que je suis. En 2001, cependant, le spectaculaire autant que tragique attentat contre le World Trade Center à New York est venu bouleverser l'indifférence que m'inspirait ce jour. Mais c'est en m'intéressant de plus en plus à la culture et à la langue catalanes que je me suis aperçu que c'était d'abord la fête nationale de la Catalogne. À bien y réfléchir, c'est une fête étonnante car, contrairement à l'habitude des peuples, il s'agit de commémorer non pas une victoire mais une défaite à cause de laquelle, en 1714, l'État catalan a perdu sa liberté.

Faut-il en conclure que les Catalans aiment se faire du mal, en célébrant ainsi, tous les ans, de façon officielle et populaire, une date aussi triste ? Je crois au contraire que c'est une attitude profondément positive car la conscience de la défaite nous fait comprendre nos limites et nous pousse à nous améliorer et à acquérir les forces nécessaires pour être victorieux. C'est aussi le moyen pour les Catalans de ne jamais oublier que leur nation disposait d'un État et de toujours avoir à l'esprit qu'ils pourront de nouveau avoir le leur un jour.

Ce désir de victoire, je l'ai vécu le 11 septembre de l'année dernière, lorsque près de deux millions de Catalans ont proclamé ensemble leur volonté de liberté dans les rues de Barcelone. Imaginerait-on, dans les rues de Paris, près de quinze millions de citoyens français en train de manifester pacifiquement ? C'est pourtant ce que les Catalans, dont des amis proches, sont parvenus à faire le 11 septembre 2012, si l'on rapporte le nombre de manifestants à celui des habitants de la Catalogne ! Depuis ce jour-là, je ne peux plus être indifférent au 11 septembre : c'est à jamais l'image de ce que les peuples qui veulent vivre libres doivent faire, s'unir démocratiquement autour de valeurs communes pour réclamer, sans haine et agressivité, leur droit à disposer d'eux-mêmes.

Et cette année, l'enthousiasme m'a fait franchir une nouvelle étape : j'ai pleinement vécu le 11 septembre, et non plus comme spectateur mais comme acteur. Avec mon organisation Iniciativa per Occitània, à la Jonquera, je me suis uni à la Via Catalana, cette chaîne humaine de plus de quatre cents kilomètres qui a manifesté au monde entier et avec éclat la force de la nation catalane. Comme il est difficile de trouver les mots ! Quelle émotion d'avoir ainsi joint les mains avec tant de Catalans, plus d'un million, rassemblés avec autant d'organisation que d'esprit festif pour proclamer au monde leur volonté d'indépendance !



Visca Catalunya lliure !




Gerard Joan Barceló
Directeur de la revue électronique Linguistica occitana (www.revistadoc.com)

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