mercredi 9 juillet 2014

Le moment de la rupture démocratique


"Il ne s'agit pas, cher Président, de demander aux citoyens par des élections régionales si nous avons le droit de décider"


"Vous êtes venus parler de quelque chose qui n'existe pas, il n'existe aucune souveraineté différente de celle du peuple espagnol. Pour être simple : elle n'existe pas !". C'est ainsi que Rajoy nous dit très clairement qu'il n'y a aucune brèche. Il n'existe pas de volonté de reconnaître que nous sommes un peuple, une nation ni d'adaptation du droit de décider dans le cadre légal actuel, même s'ils le pouvaient. Il est vrai que le Tribunal constitutionnel a incorporé l'expression du droit de décider dans sa doctrine pour la première fois, mais elle le rend non viable en l'emboîtant aux procédures que l'Etat tutelle et autorise.

Attendre ne sert à rien et il n'y a aucune carotte fédérale qui vaille. Le Parti nationaliste basque rappelait à Rubalcaba (ce grand fédéraliste qui en vérité ne va pas plus loin que l'aéroport de Sabadell) qu'il avait déjà entonné il y a 9 ans le même refrain du dialogue et de la réforme constitutionnelle lors du plan Ibarretxe et ensuite plus rien.

On nous nie mais nous existons. Nous sommes une des nations les plus anciennes d'Europe et avec les propositions les plus modernes : une nation qui base son existence sur la reconnaissance mutuelle et volontaire de ses citoyens, un pays qui naîtra du vote. Ainsi donc, la question n'est pas quel chemin nous suivons dans le labyrinthe constitutionnel espagnol, la question n'est pas s'il y aura ou non une rupture démocratique. La question est quel moment est le plus approprié pour la faire.

Il ne s'agit pas, cher Président, de demander aux citoyens par des élections régionales si nous avons le droit de décider. Le 25 novembre 2012 nous avons déjà répondu à cette question de manière claire et précise : 74 % des votes ont dit que nous sommes un sujet souverain pour décider, à ce moment-là on nous a donné mandat pour faire une consultation. Ce pas-ci, nous l'avons déjà fait.

Des élections ne seraient qu'un pas en avant si elles étaient à propos de la déclaration unilatérale d'indépendance. Mais dans ce cas-ci, toutes les candidatures répondraient-elles à la même question ou chacun proposerait-il un plébiscite à son goût ? Voterait-on au sujet de l'indépendance ou aussi pour des programmes et des partis ? Dans cette conjoncture, il est certain que la plupart des médias situerait le débat entre fausses promesses de troisième voie et abîme sidéral. Et évidemment, ces élections n'éviteraient pas d'engendrer une rupture démocratique avec le cadre constitutionnel espagnol, une fois gagnées par le programme électoral (ou la somme de programmes) qui inclurait l'indépendance.

La consultation du 9 novembre prochain, en revanche, propose la décision de manière claire et isolée des autres sujets. Les Catalans la comprennent et le monde également. Elle situe la libre décision comme point de départ d'un processus d'indépendance négocié. Elle change les cadres mentaux de l'opinion publique catalane, espagnole et internationale. Elle transfère la charge de la preuve de l'autre côté : qui et comment, en démocratie, peut empêcher que l'on sache l'opinion des citoyens ? Elle inclut la troisième voie de manière concrète, s'il existe toutefois quelqu'un qui veuille vraiment la concrétiser. Le débat ne serait pas entre fausse troisième voie et abîme, mais entre rester dans notre situation actuelle, une proposition concrète (si elle arrive) de voie fédérale et le commencement d'un processus de négociation vers l'indépendance. La plupart des médias pourront dire ce qu'ils veulent, mais le débat existe déjà entre ceux qui veulent que tout le monde vote et ceux qui ne veulent même pas les leurs votent.

La consultation a seulement un petit inconvénient, qui est un grand avantage : elle est plus proche. La rupture démocratique sera inévitable parce que l'Etat l'a voulu ainsi. Nous avons été et nous resterons extrêmement soignés dans les formes et les procédés. Mais la rupture ne doit pas nous faire peur si elle arrive avec un bulletin de vote à la main.
Lire cet article en italien, espagnol, anglais


Oriol Amorós
@oriolamoros
Membre du Parlement de la Catalogne











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