samedi 12 avril 2014

L’ONU reproche au roi d’Espagne de ne pas poursuivre en justice les crimes du franquisme



Le rapporteur spécial de l’ONU, Pablo de Greiff, a reproché à l’Etat de ne pas enquêter sur les “graves” crimes de la guerre civile et de la dictature ni de les porter au tribunal et il a déploré “l’énorme distance” qu'il y a entre les autorités espagnoles et les victimes du franquisme. 


Après une visite de dix jours en Espagne, le rapporteur spécial sur la promotion de la vérité, de la justice, de la réparation et des garanties de non-répétition a exposé ses premières conclusions avec une série de recommandations pour le gouvernement, parmi lesquelles neutraliser la loi d’amnistie de 1977 et faciliter l’accès à la Justice de toutes les victimes. 


Lors d’une conférence de presse, De Greiff s’est approprié les recommandations du Comité contre la torture et le Comité contre les disparitions forcées de l’ONU, particulièrement en matière de justice où se trouvent les “plus grandes carences”. 

Il a donc demandé au gouvernement espagnol de neutraliser la loi d’amnistie de 1977 et de permettre aux victimes du franquisme de faire appel à l’appareil judicaire en adaptant les lois espagnoles aux standards internationaux. 

En Espagne, il a été invoqué que “cette loi n’est pas une loi de point final”, a-t-il signalé, même si “elle a fini par remplir les fonctions d’une loi de point final puisqu’elle a été utilisée pour classer pratiquement la totalité des cas qui arrivent devant les juges”. 

De Greiff a rappelé que dans des pays où des lois d’amnistie n'ont pas été dérogées, les tribunaux ont trouvé des interprétations de ces normes “qui n’ont pas empêché la poursuite des responsables présumés”. 

Le délégué des Nations Unies a assuré qu’il est “particulièrement surprenant” que l’Etat n’ait pas agi davantage en faveur des victimes puisque “ce n’est pas une affaire de politique partisane ni un rachat de certains programmes politiques particuliers mais des droits qui concernent tout le monde”. 

Selon lui, ceci explique “l'énorme distance” entre les institutions de l’Etat et les victimes du franquisme, qui est la plus grande qu’il ait observée dans sa carrière professionnelle, a-t-il ajouté. 

Dans son rapport, le rapporteur a prié les tribunaux espagnols de collaborer avec les procédures engagées à l'étranger en allusion à la plainte déposée en Argentine par plus de cent associations de victimes du franquisme. 


Sur ce point, il a critiqué les actions de l'Audience nationale et du Parquet "apparemment menées" pour éviter que le Tribunal constitutionnel se prononce sur la loi d'amnistie et sur la prescription des "violations si graves des droits de l'Homme", a-t-il ajouté, "qu'elles pourraient constituer des crimes de guerre et de lèse-humanité". 

C'est le cas, a-t-il indiqué, du positionnement du Parquet de l'Audience nationale qui a refusé la demande d'extradition des deux prétendus tortionnaires franquistes José Antonio González Pacheco, Billy el Niño, et Jesús Muñecas Aguilar. 

Le rapporteur a également manifesté son "inquiétude" face à la proposition de loi du PP (parti populaire espagnol) sur la justice universelle qui "limiterait considérablement" l'application de ce principe dans les tribunaux espagnols. 

D'autre part, le rapporteur a déploré que les autorités n'aient pas mis en place une politique d'Etat pour "officialiser la vérité", d'où la nécessité d'autres ressources pour mener à bien les recherches nécessaires dans ce domaine comme cela se passe avec la mise à jour de la carte des fosses, un domaine, a-t-il dit, "qui n'a pratiquement reçu aucun financement de l'Etat". 

Dans cette lignée, il a recommandé le renforcement de la loi de Mémoire Historique pour "suppléer aux vides" qui existent dans celle-ci comme l'oubli des prisonniers et des personnes arrêtées sous le régime franquiste et celles qui étaient destinées à des camps de travail et de concentration. 

Il a aussi fait allusion à "l'ambigüité" au moment d'expliquer la guerre civile et la dictature dans les écoles et il a demandé une transformation de El Valle de los Caídos "comme les victimes l'exigent et le méritent". 

Le rapporteur termine aujourd'hui sa visite officielle en Espagne, où il s'est déplacé à Madrid, en Andalousie, en Catalogne et en Galice lors d'un voyage où il a rencontré le ministre des Affaires étrangères, José Manuel García-Margallo, ainsi que différents représentants de l'Etat, des victimes et de la société civile. 


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