L’armée d'Hitler venait juste de battre la France lorsque le gouvernement de Franco, profitant de la victoire de ses amis nazis, commença à agir contre les exilés républicains en France. Tout d'abord, il essaya de détruire toutes les organisations que les réfugiés maintenaient en fonctionnement dans leur exil ainsi que de prendre le contrôle de leurs biens et de leurs documents ; d'autre part, il s’efforça aussi, avec l’aide des allemands, de faire arrêter et renvoyer en Espagne diverses personnalités républicaines qui se trouvaient dans la «zone occupée» par l'armée allemande, ainsi que d’en faire arrêter et extrader d’autres qui se trouvaient dans la «zone libre» dépendant du gouvernement de Vichy. [...]
Nous croyons que les livraisons de réfugiés républicains résidant dans la France occupée prirent fin suite aux protestations du gouvernement de Vichy devant la Commission d'armistice franco-allemande à Wiesbaden, car elles n’étaient pas prévues par les clauses de l’armistice et, par conséquent, il aurait appartenu aux autorités françaises de s’en occuper, après présentation par le gouvernement espagnol d’une demande d’extradition.
Et c’est justement le 23 août 1940, quelques jours après que le président Companys eût été détenu dans la zone occupée, que la représentation diplomatique du Mexique en France et le gouvernement de Vichy signèrent un accord très important pour régler la situation des réfugiés républicains en France. Par cet accord, le gouvernement de Vichy s’engageait à garantir l'existence et la liberté des réfugiés républicains en France et surtout à limiter les extraditions sur demande du gouvernement de Franco aux seuls crimes et délits de droit commun sans aucune lien avec des actes de nature politique. Le gouvernement français s’engageait également à ne permettre la livraison d’aucun réfugié espagnol, nulle part sur le territoire français, sans passer au préalable par la procédure d'extradition. Par conséquent, il était clair que les livraisons directes aux autorités espagnoles telles qu’effectuées par les Allemands n'étaient pas légales et devaient être supprimées.
Finalement, le gouvernement mexicain offrait aux plus de 100 000 réfugiés qui se trouvaient en France la possibilité de voyager au Mexique s’ils le demandaient, en leur fournissant des moyens de transport gratuits. Et il s’engageait, dans l’attente de leur embarquement, à les aider financièrement, prenant ainsi le relais de la tâche effectuée jusqu’alors par les organisations républicaines JARE [Conseil d'aide aux républicains espagnols] et SERE [Service d’évacuation des réfugiés espagnols], qui depuis l'occupation de Paris par les troupes allemandes avaient été supprimées et dont les locaux, biens et fichiers avaient été saisis par la police espagnole relevant de l’ambassade de l’Espagne franquiste.
En outre, l’exécution du président catalan Companys, le 15 octobre 1940, à Barcelone, déclencha une vive réaction internationale. Au Mexique, un comité fut créé pour aider les Républicains espagnols en péril, qui promut des actions dans toute l'Amérique. Les gouvernements de plusieurs de ces pays exprimèrent leur préoccupation au gouvernement de Vichy, face au risque que d'autres réfugiés républicains fussent livrés au gouvernement de Franco. Tous ces faits contribuèrent à faire cesser les livraisons de réfugiés par l’Allemagne et le gouvernement du maréchal Pétain n'accorda plus l'extradition des personnalités républicaines réfugiées réclamées par le gouvernement de Madrid. Le refus persistant du gouvernement de Vichy aux demandes d'extradition du gouvernement de Madrid provoqua la diminution du nombre de demandes présentées.
Auteur: Josep Benet
Les extraits sont tirés du chapitre que Josep Benet (1920-2008) a consacré à la persécution par Franco des républicains réfugiés en France dans son livre Exili i mort del president Companys (Exil et mort du président Companys), publié en 1990.
Oriol López
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